Par Liesk
(Préambule: le but de cet essai n’est pas de représenter les opinions de la communauté thériane toute entière. J’écris ceci pour expliquer une approche particulière de la thérianthropie: celle de nature psychologique. Même si une bonne part de ces informations peut être applicable plus largement, elles ne devraient pas être prises comme référence absolue sur la manière dont tous les thérians voient leur thérianthropie. De plus, il ne faut pas oublier que la cause d’une chose n’est pas la chose en soi. Quand bien même une cause et explication des vécus thérians serait trouvée, ni l’explication ni la source ne sont l’expérience elle-même.)
Prenez votre cerveau. La plus grande probabilité est que vous ayez un cerveau humain, avec deux hémisphères divisés en régions, et toutes les autres qualités remarquables d’un cerveau. Au premier coup d’oeil, il semblerait que ce soit un cerveau parmi tant d’autres.
Cependant, si vous êtes une personne animale, un thérianthrope, il y a des chances pour qu’il diffère sensiblement du cerveau de la plupart des gens. En fait, que vous soyez un thérianthrope ou non, votre cerveau diffère forcément de diverses manières de tous ces cerveaux qui lui ressemblent tant. C’est sans aucun doute un organe mystérieux, et nous ne connaissons pas tout de son fonctionnement complexe. D’un autre côté, les neurosciences modernes ont révélé une infinité de possibilités sur cet organe et tout autant d’information à propos de ces cerveaux qui sont atypiques.
Il existe donc de nombreuses façons dont une personne peut être neurobiologiquement atypique; en effet, les limites définissant le “normal” étant très étroites, on pourrait se demander si qui que ce soit appartient effectivement à cette catégorie. Bien que je compte explorer les connexions qui existent, je me concentrerai sur le cerveau thérianthrope. Gardez cependant à l’esprit le fait qu’aucune étude formelle n’a été faite auprès de ceux qui se disent thérians, donc ce qui suit doit être compris comme relevant de l’hypothèse.
Tout d’abord, les modèles neurologiques s’appuient sur une conception physique de la nature de l’esprit. Et si la thérianthropie peut être expliqué neurologiquement, alors on peut certainement avancer que la thérianthropie relève du Savoir, une antithèse à la conception commune de la thérianthropie qui la voit comme trop personnelle pour être comprise entièrement.
Un instant; il y a deux problèmes avec cette vision des choses. Premièrement, le fait que la thérianthropie puisse relever de modèles personnels et parfois spirituels, et que l’on ne puisse donc pas espérer constituer un “savoir” de la thérianthropie par des bases neurologiques. La définition n’est pas malléable au point d’être modifiée par les causes retenues. Mais surtout et avant toute chose, la thérianthropie n’a jamais été en dehors de ce qui peut être connu.
L’idée que la thérianthropie soit si mystérieuse et personnelle et qu’elle ne puisse jamais être prouvée, ne puisse jamais être affirmée de manière absolue, est l’une des premières erreurs que font ceux pour qui l’idée de thérianthropie est nouvelle; et bien souvent aussi pour ceux pour qui elle ne l’est pas. Bien que j’explore les dynamiques probables, je n’ai pas l’intention de m’étendre sur une chose que nous savons déjà.
Le fait est que les thérians savent qu’ils sont un animal. Ils savent qu’ils sont un animal parce qu’ils le sont, et s’il ne savaient pas qu’ils l’étaient alors ils n’en seraient pas. Peut être qu’ils ne le savent pas en apparence; c’est souvent le cas.
Mais le cerveau le sait. Au bout du compte, le thérian va s’identifier à un animal. Ils s’identifient ainsi parce que leur esprit interprète leur existence de cette manière. Une identité implique une existence; en tant qu’individus, personnes animales, consciences, mots, non-mots, chair, esprit: ce sont des animaux.
La thérianthropie n’est rien de plus. Identité. Et il n’est pas du tout question de cela: ce sont des odeurs et des goûts, la fourrure et les sons, les pensées et les choses de la tête qui ne collent pas avec les choses humaines. Mais cela se traduit en une identité, parce que c’est comme ça que le cerveau se dit qu’il est animal et il sait que c’est vrai.
Ne confondez pas cela avec une acceptation aveugle de n’importe quelle affirmation qu’une personne avance sur le fait d’être animal: même en gardant cela en tête, déclarer qu’on est un animal ne fait pas de quelqu’un un animal. On sait ce que l’on est, mais il est facile de laisser son jugement se faire obscurcir par des illusions et refuser d’accepter la vérité. Nous le savons bien, les gens ont tendance à se mentir à eux-mêmes plus encore qu’ils ne mentent aux autres. Cela peut prendre un long moment pour découvrir sa propre identité, et plus longtemps encore quand il faut faire face à l’influence de ses propres espoirs en faveur d’une conclusion plutôt qu’une autre.
Si vous essayez de savoir si vous êtes un thérian, alors pendant que vous écoutez toutes les recommandations qui vous disent de faire un examen de conscience, que c’est un indispensable pour savoir ce que vous êtes et qu’il ne faut pas tirer de conclusions hâtives; vous devez aussi réfléchir au fait que vous devriez déjà savoir ce que vous êtes. Vous ne vous donnez aucune nouvelle information; vous ne faites que découvrir une chose qui a toujours été présente, que vous avez toujours su.
La question est: pourquoi sommes nous des animaux? Pourquoi avons-nous cette nature animale, ces impulsions et ces désirs, et pour certains, ces shifts? Que se passe-t-il dans nos cerveaux?
Je crois personnellement que l’origine de la thérianthropie, pour la grande majorité des cas, repose dans une neurobiologie atypique. Tout comme pour des choses allant de l’autisme à la synesthésie, allant des QI élevés aux troubles du développement, il existe certains indices qui suggèrent que le “câblage” du cerveau est foncièrement différent.
Tout simplement, il semblerait que ce soit effectivement le cas; que les thérians fonctionnent comme les animaux. Un grand nombre de thérians disent avoir un mode de pensée visuel, ou pensent d’une façon ou l’autre principalement sous une forme non-verbale. Et bien qu’il ne semble pas y avoir un nombre très largement plus important de thérians présentant des fonctions neurologiques atypiques comme la synesthésie, l’autisme, le syndrome d’Asperger, etc… que dans la population générale, de nombreux thérians présentent malgré tout des caractéristiques similaires à ceux-ci, et il est possible qu’on retrouve certains de ces traits unanimement chez tous les thérians.
Ces traits comprennent la pensée perceptive mentionnée auparavant, une synthèse entre les activités des cerveaux dits gauche et droits, des traits similaires à ceux du TDA ou TOC, et ainsi de suite. Il est important de noter que tous les thérians ne présentent pas chacun de ces traits, et il est certainement possible que quelqu’un soit un thérian sans faire l’expérience d’aucun. La majorité, cependant, semble emprunter des caractéristiques à au moins un ou deux modèles de cette liste, et on peut probablement avancer que presque tous les thérians traitent les informations qu’ils perçoivent différemment du reste de la population.
D’autre part, chaque thérian semble avoir un câblage qui correspond à leur animal. La raison du comment ceci se met en place sur une base individuelle reste une question en suspend, bien que je puisse aborder le sujet plus tard. Mais qu’est-ce qui causerait tout ceci exactement?
Certainement, une neurobiologie atypique est généralement quelque chose que la personne présente dès la naissance. Ceci s’accorde bien avec l’idée qu’on est thérian “depuis toujours”. D’un autre côté, il semble évident qu’une personne ne devienne pas un thérian simplement parce que son cerveau fonctionne légèrement différemment. Ils doivent – leurs cerveaux – se considérer eux-mêmes comme étant animaux. Comment cela se produit-il?
D’après ce que l’on a pu observer il semblerait que cela se fasse normalement tandis qu’un sens de l’identité se crée. Presque tous les thérianthropes racontent qu’ils se sont sentis comme un animal leur vie entière, remontant ainsi jusqu’à leurs tout premiers souvenirs. Quels que soient les facteurs déclencheurs de l’identité animale pour qu’elle se développe, cela se produit donc sans doutes à ce moment.
Notre nature en tant qu’être humain relève en partie du domaine de l’abstrait. Ce que nous voyons dans le monde physique passe au travers des filtres de notre esprit, s’organise, et des idées en ressortent, des pensées, et une identité. Cette capacité à procéder ainsi est due à notre prédisposition à la conscience et représentation de soi; les neurosciences actuelles nous montrent que l’identité est intrinsèquement liée à la conscience de soi. Le développement d’une identité personnelle est le résultat de l’observation de structures, et la capacité spécifiquement humaine à interpréter la relation abstraite que l’on entretient soi-même avec son propre environnement.
Au cas où vous ne l’auriez pas saisi, je le reformule: c’est une chose distinctement humaine. Bien qu’il soit possible, voir même vraisemblable, que certaines espèces (comme les dauphins) soient des êtres suffisamment développés et sociaux pour que la nécessité de l’apparition d’une conscience et identité soit présente, la nature proprement abstraite de l’identité en tant qu’humain – en particulier une identité atypique – est quelque chose dont aucune autre espèce ne fait l’expérience, à notre connaissance. L’ironie, bien sûr, est qu’en étant animal nous exprimons notre état humain, mais il y a plus que de l’ironie à ce sujet. Être humain – ou, si vous préférez, avoir conscience de soi-même – est une sorte de clé permettant de devenir quelque chose d’autre que ce que notre corps nous impose. Cela signifie mettre à l’épreuve nos notions de ce que veut dire être un membre d’une espèce en particulier. Il n’y a bien sûr pas de dichotomie énorme entre notre corps et notre esprit qui soit reconnu par la science moderne. Mais avoir conscience de soi offre la possibilité de se reconnaître comme une multitude de choses, qui deviennent de plus en plus abstraites à mesure que la personne progresse. Et une personne encline à la spiritualité aurait raison de suggérer que la nature humaine est faite pour pour la croissance spirituelle, si l’on considère que leur définition de l’âme est proche de cette de notre identité.
Les êtres humains ont évolué de telle manière qu’ils ont accédé à la conscience de soi, comme nous pouvons clairement le voir. Étant donné qu’être conscient est particulièrement plus avantageux que ne pas l’être, une espèce qui peut l’être obtient un joker. Un animal conscient de lui-même peut mieux réagir face à son environnement, ce qui accroît les chances de survie. C’est aussi profondément lié à une fonction sociale: en théorie, les humains ont obtenu la conscience de soi en observant les autres dans leurs groupes sociaux et en appliquant ce qu’ils ont observé à eux-mêmes. L’anthropomorphisme est une conséquence de ceci, ce que l’on peut voir à la manière dont les premiers humains étaient généralement animistes. Ceci est à mettre en lien avec le “gène de la religion”: les humains sont même capables de rendre anthropomorphique l’univers entier, en disant qu’il doit exister un Créateur leur ressemblant.
Le développement d’un individu humain a une manière amusante de nous conter l’histoire humaine. Durant les premières années de sa vie, les similarités qu’un enfant observe entre son environnement et lui-même se solidifient en une identité basique. Le noyau. Pour un enfant présentant une neurobiologie atypique, ses propres comportements peuvent le mener à percevoir différents rapports que ceux qu’un enfant normal pourrait observer. A cause de cela, une identité d’une différente sorte peut se développer. Pour les thérians, cela signifie une identité animale.
Quelle animal, cependant, est une question qui mérite d’être relevée. La plupart des thérians n’ont pas connaissance de l’existence de leur thériotype pendant les premières années de leur vie. En conséquence, comment en sont-ils venus à s’identifier en tant que tels?
Ceci débute par cette question retournée en long en large et en travers: “pourquoi y a-t-il autant de félins et de canidés dans la communauté thériane”? Si le thériotype d’un individu se détermine durant la période à laquelle je pense, alors les influences animalières les plus fortes à disposition pour la psyché de l’enfant sont les chiens et les chats. Même si le foyer de l’enfant ne possède aucunes de ces créatures, l’influence des animaux de compagnie sur la plupart des enfants est importante. Et pour ces enfants dont le comportement n’est pas tout à fait comme celui des autres humains qu’ils peuvent voir, reconnaître certains traits chez ces animaux peut suffire à solidifier leur identité.
Bien sûr, la plupart des thérians ont le sentiment d’être un cousin sauvage de l’un de nos compagnons domestiques. Si l’on conçoit qu’au moins certains de ces individus ne se trompent pas au sujet de leur thériotype, et que l’on reconnaît que bien que certains d’entre eux aient pu être influencés par d’authentiques loups ou autre, ce n’est pas le cas de la majorité, et l’on est alors contraint de reconnaître plus encore que la nature de l’identité est énormément abstraite. Un enfant peut développer le sentiment que son identité est très proche de cette d’un chat ou d’un chient, mais en laissant un cadre plus large pour l’intervention d’autres facteurs de ses comportements et de soi pour devenir une identité non-étiquetée – qui sera identifiée comme correspondant à une autre espèce plus tardivement.
Ceci nous amène à considérer ces thérians dont le type animal ne ressemble pas aux animaux qui ont eût un impact direct sur leur vie. L’identité d’espèce d’un enfant peut rester en suspens en ce qui concerne sa catégorie – s’ils reconnaît qu’il n’est pas qu’humain mais ne voit pas ce qu’il pourrait être, alors il est possible qu’en conséquence son identité spéciée n’est temporairement rien d’autre qu’un ensemble de traits. Si plus tard il trouve une espèce qui correspond sans faille à ces traits, alors il peut la reconnaître comme étant leur espèce intérieure – mais ceci pourrait ne jamais se produire. En conséquence, il existe des enfants n’ayant jamais vu de cerfs qui finissent par en être, et d’autres gamins qui vont comprendre que leur nature correspond plutôt au concept de dragon qu’à une espèce vivante. Et ainsi de suite.
Partant de là, la solidification de leur identité et comportements associés ainsi que les spécificités de ses structures neurobiologiques vont servir à créer un possible dans lequel l’individu s’identifie à son animal type. Le degré auquel leur esprit distingue les pensées d’ordre supérieur ou inférieur peut avoir un impact sur la manière dont ils font l’expérience de leur thérianthropie, tout comme leur relation au fait d’être humain.
Comme la communauté thérianthrope le sait bien, différents thérians déclineront leur thérianthropie avec une “saveur” différente. Ceci est, fort malheureusement, bien souvent catégorisé selon les degrés de polarisation entre l’aspect animal et l’aspect humain, et la possibilité de shift mentale qui découle de cette polarisation.
Un thérian avec une polarisation plus importante (décrit comme thérian dichotomique) a développé une structure cérébrale où il existe deux (ou plus, dans le cas de thériotypes multiples) modes de fonctionnement complets et indépendants. Le thérian a séparé les comportements humains et animaux l’un de l’autre, et son cerveau classifie distinctement certains d’entre eux comme appartement à la sphère humaine et d’autre comme appartenant au domaine(s) de l’animal (ou des animaux). Le degré permettant aux deux de se superposer l’un avec l’autre ne peut aller au delà d’un certain point, afin de permettre le basculement d’un mode de pensée vers l’autre malgré tout.
Tandis que les modes de pensée sont distincts, contrairement à un individu présentant un désordre dissociatif de l’identité ou trouble de la personnalité multiple, le thérian n’a pas d’identités séparée pour chaque mode de pensée additionnel. Les composantes humaine et animale restent une part intégrée à son identité, quelle que soit le mode de pensée dans lequel il se trouve. (Les personnes possédant plus d’une identité seront plutôt appelées “multiples” ou, comme cité précédemment, présentant un trouble dissociatif ou de la personnalité multiple.)
Un thérian dont les différents modes de pensée se chevauchent, mais ne sont pas fusionnés, fonctionne de la même manière, à l’exception du fait que les modes ne fonctionnent pas indépendamment l’un de l’autre: ils sont plutôt coordonnés. Son esprit fait toujours la distinction entre les comportements humains associés au mode de pensée humain, et les comportements animaux associés au mode animal, mais ils marchent en parallèle avec la capacité de se concentrer plus sur l’un ou l’autre, à la manière dont on peut faire tourner plusieurs programmes sur un ordinateur avec une unique fenêtre active. Pour certains, un programme peut aussi se fermer pour permettre à un autre de tourner à pleine puissance.
Si le thérian possède un mode de pensée mélangeant l’humain et l’animal, mais que l’intégration n’est pas totale, dans ce cas bien que son cerveau ne classifiera pas ses comportements selon deux modes bien distincts, ces comportements à l’intérieur de cet unique mode de fonctionnement seront tout de même interprétés comme étant plutôt humains, plutôt animal, ou un peu des deux. Ils peuvent être catégorisés en conséquence par association, et ainsi le déclenchement d’un comportement considéré comme humain ou animal provoque les comportements associés, entraînant la possibilité de se sentir un peu plus humain ou animal à un moment donné. Les connexions entre les associations sont fortes, donc un comportement humain qui est relié à une catégorie animale peut tout aussi bien lancer le processus pour se sentir animal; il peut y avoir des processus à catégories multiples au sein d’un ensemble d’associations. Le résultat sera un certain degré de fluctuation entre l’humain et l’animal, mais les détails précis sont clairement propre à chaque individu.
Si l’intégration est complète en revanche, alors quelle que soit l’organisation des catégories, chaque processus sera considéré comme “humanimal”, de la même manière qu’un cerveau non-thérian catégorise tout comme “humain”. Le cerveau interprète chaque comportement comme étant causé par la nature globale humaine-animale, et jamais séparément par l’un ou par l’autre.
(Je ne prétends pas que ces exemples soient les seuls types [de thérianthropie] qui existent, comme j’imagine bien que beaucoup de gens ne rentrent pas tout à fait dans ces catégories. Elles sont simplement celles qui semblent les plus répandues, et je tente d’expliquer ce phénomène. La thérianthropie, encore une fois, est indépendante de sa propre opinion personnelle sur son expérience.)
Bien que cela puisse être intéressant de développer pourquoi un certain type de thérianthropie se développe plutôt qu’un autre, tout ce que je peux faire c’est tenter d’apporter une explication encore plus hypothétique. Je crois que les considérations personnelles de la personne sur ce que signifie être humain et être animal aura un impact, mais je ne suis pas capable de dire dans quelles proportions, par rapport à d’autres facteurs comme la chimie du cerveau et l’environnement de l’individu. Très probablement, chacun contribue de différentes manières selon la personne. Il semblerait que ça soit le cas que, comme pour le TDI par exemple, il soit plus probable qu’une dichotomie entre les modes de pensée se produise pour les individus qui sont soumis à un environnement stressant (ce qui signifie pour ces personnes que l’environnement a une influence significative). Cela ne veut bien sûr pas dire que les conthérians sont les mieux ajustés et que les thérians dichotomiques le sont moins, ou qu’une dichotomie est toujours le résultat du stress. La plupart des gens fonctionnent parfaitement bien avec la façon dont leur nature animale correspond à leur nature humaine.
L’expérience mentale d’être humain ou animal n’est pas, évidemment, la fin du chapitre sur les shifts. Beaucoup de thérians font aussi l’expérience de quelque chose de proche des membres fantômes de personnes amputées, ce qui a donc été décrit comme des “shifts fantômes” (bien que “membre fantôme” soit aussi courant, en particulier pour les personnes qui les ressentent en permanence et non pas en shiftant). Certains aspects de ce phénomène resteront peut être bien mystérieux ou nécessiteront d’autres explications, mais ce que je crois c’est que la plupart des membres fantômes sont causés par le cerveau qui “cartographie” le corps comme il devrait être, conformément à la dysphorie de corps qui résulte d’une identité d’espèce atypique.
Certaines études ont découvert que le cerveau possède une façon de créer une sorte d’image 3D du corps et de ses mouvements, et que ce système n’est pas infaillible. La manipulation consciente et semi-consciente de ce système que j’appelle “cartographie” peut avoir des conséquences notables. Dans une étude en particulier, les individus qui cartographiaient les mouvements d’une certaine action, comme danser ou lancer un ballon de basket, s’en sortaient moins bien que ceux qui pratiquaient cette activité, mais toujours mieux que ceux qui ne faisaient rien du tout. Ce système est aussi dupé naturellement – sans interférence consciente – comme avec les douleurs référées.
J’insiste sur le fait que quand je dit “dupé” je ne veut pas dire que l’expérience de membres fantômes est fausse. Ils sont différents de ce que le cerveau détecterait normalement, mais cela ne les rend pas faux ou superficiels. Ils existent parce que vous (notre cerveau, notre esprit semi-conscient) avez le sentiment qu’ils sont important, et ils le sont probablement.
En conséquence il n’est pas surprenant que beaucoup de thérians aient leur corps animal cartographié en surimpression par dessus leur corps humain. Cela résulte d’un modèle dans le cerveau qui fonctionne en parallèle avec le modèle habituel du corps humain. Chez certains individus, le modèle fantôme domine parfois le modèle humain et vice-versa. Chez d’autres, les deux modèles fonctionnent toujours en parallèle, et chez d’autres encore d’autres scénarios peuvent exister.
Ce qui est intéressant c’est que ça n’est pas restreint au thériotype de la personne.
Les caméo-shifts. Il est essentiel pour tout thérianthrope en questionnement de savoir qu’elles existent, afin qu’il puisse comprendre que ses shifts puissent ne pas être celles de son propre animal. Il faut savoir qu’à la fois les thérians et les non-thérians peuvent faire l’expérience de caméo-shifts. A mon sens les caméo-shifts mentales tout autant que fantômes sont le résultat d’une cartographie [atypique].
Pour les caméo-shifts fantômes, l’individu cartographie la structure corporelle de la chose en quoi il shifte. Habituellement, c’est un phénomène temporaire, contrairement à la thérianthropie qui est constante. (Bien sûr, il est aussi possible que quelqu’un ait une cartographie permanente de quelque chose qui n’a rien avoir avec leur thériotype – une explication probable du fait qu’il y ait beaucoup de personnes qui ont des ailes fantômes bien que leur thériotype ne soit pas une créature ailée à la base.)
Pour une caméo-shift mentale, ce qui est altéré n’est pas l’architecture physique, mais la structure mentale. Les comportements, les instincts, deviennent temporairement une part du fonctionnement psychique de la personne.
Normalement, une puissante shift de cette sorte apparait d’elle-même, mais parfois simplement penser à un animal peut causer une légère shift. Si la personne à un esprit enclin à faire des liens entre les choses, à comprendre le point de vue animal, alors elle a des chances de faire l’expérience de caméo-shifts. Ce n’est pas le signe d’une instabilité, mais plutôt un désir d’explorer son monde.
Certaines personnes peuvent souhaiter revisiter un animal en particulier dans leurs explorations. Cet animal est souvent notre totem, ou bien il possède une signification d’une façon ou d’une autre, bien que cela puisse tout simplement être que la personne aime shifter en cet animal là.
Faire l’expérience de la découverte de qui et ce que l’on est peut être très gratifiante, que l’on soit thérian ou non. L’essentiel ici est de parvenir à une relation plus profonde et complète avec soi-même, ce n’est pas la question de si c’est cérébral ou spirituel ou quoi que ce soit que vous croyiez! Bien que cela puisse être important et intéressant dans ma trajectoire de vie que je considère les possibilités neurologiques de la thérianthropie, aucune explication de la sorte ne pourra remplacer l’expérience même d’être une personne animale. Il n’y aura jamais d’examen diagnostic qui remplacera le fait de simplement regarder à l’intérieur de soi-même et voir ce que cela apporte.