Par Swiftpaw ©1999-2003 sur Swiftpaw’s Tree
Je n’ai pas écrit depuis un moment. Presque trois mois, avec pour seule raison le fait que j’avais des questionnements personnels à poursuivre. Eh bien, maintenant c’est fait. J’ai planifié les cinq prochaines années de ma vie, gravées dans le marbre, et il ne me reste que les détails à régler…
Des détails comme “quelle est la vraie raison pour laquelle je n’ai rien écrit”.
Mais j’ai le sentiment que ça sera pour un autre essai.
J’ai du mal avec la méditation. Je peux ralentir le rythme ou accélérer facilement, mais apparemment la capacité à parvenir à un arrêt complet ne fait pas partie de ma configuration de base. J’en discutais avec une amie, une thériane-louve, et elle était d’accord.
Lors des méditations guidées, aux ateliers en groupe, lors de visualisations, souvent on nous demande de trouver le lieu où l’on est le plus détendu, le plus en paix. J’ai fait beaucoup de choses cette année que je pensais être relaxantes comme arracher les mauvaises herbes, courir, ou lire au soleil. Durant chacune d’elle, mes pensées allaient à cent à l’heure. Je ne pouvais que penser à ce qui viendrait ensuite, ou me souvenir de ce qu’il s’était produit auparavant.
Je ne suis jamais vraiment seulement dans le présent, à moins d’avoir un objectif immédiat qui demande l’attention de toute mon intelligence. Et même à ce moment, je m’imagine souvent comment cela sera lorsque j’aurais accompli cette tâche, et quelle sera ma récompense.
Je pense que les carnivores ont de manière générale une excuse valable pour ce comportement. Par définition, la vie au jour le jour dépend de leur nourriture. Trouver un abri est en option, l’eau abonde, le sommeil peut être repoussé. La nourriture est nécessaire pour vivre. Un carnivore, en particulier un félin solitaire, doit faire tout le travail de chasse par lui-même. Il n’y a pas de meute, pas de régurgitation des proies pour les petits. Une proie est repérée, poursuivie, tuée, dévorée, et ensuite le félin doit aller de l’avant.
Je ne peux pas parler pour tous les félins, mais pour moi la détente est le contraire de la tension. Le seul moment où je n’ai aucun stress est l’instant juste après ma “chasse” ou que j’ai atteint mon objectif. Je peux m’imaginer parvenir à mes fins, dans un vaisseau spatial volant assez haut pour que la gravité cesse, et regarder le ciel passer du bleu au noir, et me sentir en cet instant entièrement épanouie.
Et ensuite, je le sais, je serais immédiatement à nouveau tendue. Il y aura un autre objectif – aller plus loin, découvrir d’autres lieux, les utiliser, trouver comment y vivre. Tout ceci n’est pas juste théorique, cependant. Je peux faire du sport à la salle du coin et, quand j’ai terminé mes exercices, aller me reposer dans un bon bain chaud.
Il n’y a rien de plus emmerdant que de rester là dans une baignoire. Même quand je me “relaxe”, je ne peux pas simplement me concentrer sur mon corps; “shifter”, comme on pourrait dire, sauf que shifter en jaguar me donne envie de sortir du bain et de m’agiter à nouveau. Le mélange que je suis n’est pas fait pour rester au même endroit, à moins que je sois en train de prendre des notes, en train d’écouter quelqu’un, ou d’observer les foules. Et quand bien même, je prends des notes dans ma tête, enregistrant des trucs pour plus tard. Il faut que je donne du sens à tout.
C’est peut être la survivance de certaines attitudes venant de ma mère, donc après avoir passé quelques années loin de la maison je veux bien ré-examiner tout ça. Mais pour l’instant, c’est une constante. Du mouvement! Du challenge!
Je pense que je m’en sortirai bien au camp d’entraînement des recrues.
Ce n’est pas la référence au camp d’entraînement mais le besoin de mouvement sporadiques sur le court-terme qui me rappelle les histoires de nombreux animaux captifs (auxquels je m’identifie fortement) qui, pour une raison quelconque, se mettent à arpenter leur cage de long en large, névrosés. Les animaux que j’ai observés faire cela n’ont pas de but; ils marchent, je pense, parce qu’il n’y a rien d’autre à faire. Mais je peux m’imaginer le faire avec un but à l’aller comme au retour.
J’en reviens à la méditation, à trouver la “paix de l’esprit” – dans ce but j’ai parfois réussi, et j’ai réalisé immédiatement que j’ai fait taire mon esprit. Et je me met à penser à toutes ces choses que je pourrais être en train de faire, tous ces projets inachevés, tous ces gens que je n’ai pas encore appelé ou parlé avec, tous ces essais que je n’ai pas encore écrit. La méditation, le ralentissement, la concentration – se concentrer, pour moi, est inextricable du mouvement. Quand je vais en avant, je bouge tout mon corps. Tout mon être. Constamment shiftée, je me vois au mieux comme un jaguar anthropomorphe.
Cela revient, je pense, à mes efforts passés vers la “projection astrale” ou “voyage chamanique”. J’ai essayé pendant des heures de me détendre, de quitter mon corps, de m’imaginer ailleurs. Bien que je puisse prétendre être ailleurs pendant longtemps quand je marche, que je cours ou que je somnole, mon corps est toujours avec moi. Je suis rarement complètement déconnectée. Même quand je suis jaguar, quand je suis complètement shiftée, ma conscience se concentre sur comment je bouge, mes expressions faciales, et plus particulièrement la manière dont le mouvement traverse mes épaules de part en part.
Le jaguar ne me semble pas être un félin statique. Shifter est toujours dynamique, toujours en mouvement, et même dévoré par la folie furieuse, la rage pousse à courir, à soulever des poids, à faire des pompes. La capacité du jaguar à être souple dans ses relations est tout aussi importante; adaptable sans être rancunière, et capable de réagir face à n’importe quel coup dur qui lui arrive. Je vois aisément ces attributs positifs comme étant ceux des carnivores et, à moins de l’avoir oublié, les jaguars ne sont résolument pas des chats de compagnie. Toute la culpabilité au monde et les plaintes de “pourquoi sommes nous tous des prédateurs?” n’y changeront rien.